Atlantisme ou réalisme?

Publié le par Le chafouin

 Nulle volonté ici de commenter sur le fond l'envoi de troupes en Afghanistan, ce pays qui comme rappelle mon petit Nicolas, nous donne assez de fil à retordre côté orthographe pour qu'on se croie suffisamment qualifié pour décrypter sa situation réelle.

J'ignore donc si ce bataillon supplémentaire (entre 800 et 1 000 hommes) a un intérêt opérationnel, même si on peut l'imaginer. On ne risque pas la vie de soldats pour rien, surtout en France où on n'en a pas tant que ça et où le service militaire s'est transformé peu à peu en analyse de programme télé.

On peut en revanche s'interroger sur les accusations d'atlantisme formulées par l'opposition, qui a trouvé là un excellent moyen pour faire parler d'elle autrement que pour ses luttes intestines.

Déjà, on peut se gausser de ce que ce mot soit devenu un gros mot. L'atlantisme, c'est le crime de lèse-de Gaulle. C'est le pire mal qui soit dans notre pays fondamentalement anti américain. Pour beaucoup de gens, USA = Bush = méchant = pas bien. Cela peut aussi faire penser à "espèce d'impérialiste", qui était l'insulte favorite de nos bons amis les Soviétiques. Au fond, on se demande pourquoi les Etats-Unis devraient représenter le mal absolu à combattre par dessus tout. L'exception culturelle française, c'est bien, notre indépendance aussi, mais il y a un moment où il faut mûrir et choisir son camp. Le nôtre, n'est-ce pas l'Occident? Il y a peut-être un juste milieu entre la défiance et le suivisme béât.

Ensuite, on peut se demander si cette décision sarkozienne est ou non un geste atlantiste. Rappelons qu'en 2001, le PS était aux affaires (avant de se faire renvoyer manu militari quelques mois plus tard) lorsque nos troupes avaient été envoyées en Afghanistan. Souvenez-vous! C'était l'époque où nous étions "tous américains" après les attentats du World Trade Center. On a entendu personne, à l'époque, nous seriner qu'il était immoral de suivre les USA là-bas.

Non, car après le 11-septembre, l'émotion nous obligeait moralement. Aujourd'hui que l'émotion a disparu et que le dernier chic est même de nier en dépit de tout bon sens jusqu'à l'existence de ces attentats, on a beau jeu de vouloir refuser des renforts.

De deux choses l'une : soit on accepte l'idée de départ, et on se donne ensuite les moyens des enjeux afghans, à savoir neutraliser ces dingues de talibans, soit on se pique d'indépendance et dans ce cas on ne surfe pas sur la vague solidaire et on reste chez soi.

Tout en sachant bien sûr que derrière l'arbre afghan, se cache la forêt otan, puisqu'il n'a échappé à personne que Nicolas Sarkozy envisageait de faire revenir la France dans la structure militaire intégrée de l'organisation, quittée en 1966.

A ce titre, cette citation du président (source : rue 89) est éloquente : "J’ai d’abord voulu situer, franchement et nettement, et là est la première rupture, la France au sein de sa famille occidentale. (...) En se plaçant clairement dans sa famille occidentale, la France, et c’était mon objectif, accroît sa crédibilité, sa marge d’action, sa capacité d’influence à l’intérieur comme à l’extérieur de sa famille. D'ailleurs, comment espérer avoir de l'influence sur sa famille politique si, dans le même temps, on n'y a plus sa place ou si les membres de cette famille politique se méfient de vous? La capacité d'influence de la France sur sa famille occidentale tient à la clarté de son engagement et de ses choix."

Cela signifie-t-il pour autant être le caniche des USA? Cela sous-entend-il un alignement  inconditionnel?

Eternel débat entre ceux qui veulent peser de l'intérieur, et ceux qui veulent rester "propres" et les mains libres, de l'extérieur, sans se compromettre
. Les relations internationales ne sont-elles pas justement des échanges où l'idéalisme n'est pas de mise? Ou le pragmatisme doit présider? ou il faut éternellement composer, discuter, reculer pour mieux sauter?

Rappelons cependant à toutes fins utiles que les socialistes, qui estiment pouvoir faire cavalier seul, sont toujours ceux qui veulent diminuer le budget de la Défense, en bons pacifistes bêlants. Belle indépendance qu'ils nous promettent.
A cet égard, cette blague belge m'a toujours fait rire : "Pourquoi les Français ont-ils choisi le coq comme emblème? Parce que c'est le seul animal qui est capable de chanter les pieds dans la m...".

Tâchons de toujours garder à l'esprit la débâcle de 1940. A vouloir être grand, fort mais seul, on se retrouve occupé par l'ennemi.

Publié dans International

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L
@PascalAvec nos amis socialistes, on diminue chaque année le bidget de la défense. Depuis 2002, j'ai cru comprendre que les crédits ne diminuaient plus. Il n'y a pas d'ambition claire de ce côté là. On veut peser, mais on ne s'en donne pas les moyens... La PESC devrait être, à mon sens, une division européenne de l'otan. Problème : tous les membres de l'ue ne font pas partie de l'otan... Quant à l'onu, je crois que ça fait lgtps qu'on a perdu tout espoir vis à vis de cette sdn en pire.
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P
Vous avancez à pas de tortue! Tant que l'Europe ne se dresse une armée continentale (sa PESte), que l'onusisme reste tel quel (soit impuissant et, en l'état, à la merci du viagra des pays volontaires ou égotistes), je suis d'avis que la France devrait se rémilitariser jusqu'aux dents.Même chose pour le Canada et dont l'armée, petite, reste équipée pour jouer au "paint ball", sans plus. La francophonie ne gagnerait-elle pas à se donner au moins une carapace militaire! Mais au moins une, ne fût-ce que pour défendre le droit à la vie, les droits de l'Homme, pour se projeter un peu plus à l'internationale. D'ailleurs, une politique étrangère musclée donnerait à la population un projet commun. De quoi respiritualiser un peuple embourgeoisé. Non? Ce faisant, l'on pourrait prendre toute notre place au sein de l'OTAN. Au fait, nous, Canadiens, sommes fort déçus du déploiement de l'armée française dans l'est-afghan et non à Kandahar. Nous voulions souffrir avec vous: http://www.canoe.com/infos/chroniques/michelvastel/archives/2008/04/20080405-095504.html
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L
Un lecteur de Toréador nous signale cette magnifique analyse de Justin Vaïsse, disant que dans les faits (et non les paroles), Sarkozy n'est pas si éloigné du chiraquisme et du gaullisme internationalement parlant. ça me paraît tout à fait convainquant.http://rue89.com/justin-blog/sarkozy-le-gaulliste-decomplexe
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L
@ErickMerci de la précision, c'ets justement ce que je sous-entendais dans mon précédent commentaire, puique sarkozy a clairement conditionné le retour de la france (qui encore une fois, n'est pas acté) au commandement militaire intégré de l'otan à des avancées en terme de défense européenne. Merci de le rappeler.
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E
Encore une fois, ne pas oublier que la réintégration de la France au commandement de l' OTAN est liée à la mise en route de la Défense Européenne.L' objectif n' est pas un "ralliement atlantiste" mais la constitution d' un bloc occidental dans lequel l' Europe aura toute sa part.
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