Comment peut-on célébrer Robespierre?
Et voilà qu'à Arras, sa ville natale, l'association des Amis de Robespierre (rien que le nom de l'association fait frémir) organise une exposition pour honorer le 250e anniversaire de sa naissance. "Nous avons préféré nous arrêter à 1789 . Nous rendons hommage à Robespierre l'Arrageois, celui qui ne fait pas encore débat, dans un esprit de commémoration au sens historique du terme", explique ce matin dans Nord Eclair le directeur de l'Office de tourisme.
D'une part, il n'y a pas plusieurs Robespierre : il n'y en a qu'un seul. D'autre part, Robespierre ne fait pas débat, c'est un tyran, point. Par ailleurs, s'arrêter à 1789 est une manière particulièrement malhonnête d'essayer de rendre sympathique un odieux personnage. Imagine-t-on une exposition consacrée à l'enfance d'Hitler, où l'on essaierait d'expliquer la complexité du bonhomme?
Il y a deux explications, à mon sens, à ce genre de phénomène. D'une part, la France est un pays qui a du mal avec son histoire et tout particulièrement avec la Révolution française. Tout se passe comme si, en application du propos de Clémenceau, selon lequel la Révolution était un "bloc", on avait peur de toucher au mythe, à la légende, à l'humanisme qui avait soi-disant guidé les pas des sans-culottes. Comme si on craignait, en critiquant un passage de la Révolution, de devoir tout remettre en cause.
Il y a ensuite une bien coupable tolérance à l'égard de cette association des amis de Robespierre, dont l'objectif affiché est, rappelons le, de "...faire mieux connaître ROBESPIERRE, le rôle déterminant qu'il a joué dans le grand mouvement émancipateur qu'a été la Révolution française et la part prépondérante qu'il a prise pour sauver la patrie en danger. Elle considère que le combat qu'il a mené pour une véritable démocratie, pour une réelle égalité entre les hommes, ainsi que les exemples qu'il a donnés de tolérance et d'intégrité dans l'action politique sont toujours d'actualité".
Il y a des gens qui pensent cela, en dépit de tout bon-sens historique, qui se battent pour le faire reconnaître, et qui sont financés par des collectivités territoriales. Un conseil général, plusieurs municipalités selon l'association.
Remarquez, Georges Frêche avait bien déclaré vouloir acheter une statue de Lénine pour Montpellier, et cela n'avait fait réagir personne...