Jean Leonetti rend un rapport défavorable à l'exception d'euthanasie

Publié le par Le chafouin

Le rapport de la mission conduite par Jean Lenoetti préconise donc (merci Oscar) de ne pas modifier la loi Leonetti d'avril 2005 sur la fin de vie. Il est urgent d'attendre. Il n'y aura pas d'exception d'euthanasie, comme il n'y aura pas de légalisation de l'assistance au suicide. Il y a donc aussi des bonnes nouvelles, parfois!

 

Cette étude avait été commandée par François Fillon afin de réfléchir sereinement sur cette question suite aux revendications nées des polémiques autour de la mort de Chantal Sébire, au mois de mars dernier, orchestrées comme on s'en souvient, en coulisses, par l'ADMD.

 

La mission menée par le député UMP s'est heurtée à l'impossibilité d'introduire une exception à la législation actuelle, car selon Jean Leonetti, le comité qui serait chargé de trancher les litiges n'aurait "pas de légitimité à se placer au-dessus des lois". Dans un entretien au Figaro, qu'il faut lire pour prendre en compte la compexité du problème, il précise très justement qu'il a adopté cette position "parce que [la dépénalisaiton et l'assistance au suicide] posent plus de problèmes hu­mains et juridiques qu'elles n'en résolvent". Certes.

 

Selon lui, les situations peuvent se règler d'elles-mêmes : pour les personnes en fin de vie, la loi d'avril 2005 "résout l'immense majorité des problèmes rencontrés". Il propose néanmoins la nomination d'un médécin référent en soins palliatifs pour jouer un rôle de médiateur des cas difficiles. Et d'un observatoire de la fin de vie, afin de déterminer quels sont les manques et démontrer que "nous avons besoin de moyens, de changer nos modes de pensées et de fonctionnement vis-à-vis des plus fragiles et des plus vulnérables". Pour ceux qui ne sont pas en fin de vie, en revanche, "nous avons constaté que la loi française n'interdit pas formellement cette démarche mais évite, en interdisant la manipulation des personnes vulnérables et la provocation au suicide, les dérives que la Suisse constate et tente en vain de juguler".

 

Une position qui semble équilibrée : on rejette une nouvelle fois l'acharnement thérapeutique, en arguant qu'en médecine, "la technique performante doit s'accompagner d'une dimension humaine équivalente", mais on refuse aussi d'introduire une brèche reconnaissant aux yeux de tous que certaines vies valent moins que d'autres. Et on s'engage à mettre le paquet sur les soins palliatifs, pour marcher sur les pas de la Grande-Bretagne, plutôt que d'empreinter la voie choisie par la Suisse, la Belgique ou les Pays-Bas, où les dérives constatées nous montrent l'écueil à éviter. Au passage, on propose également d'introduire des congés-fin de vie pour les proches des personnes en fin de vie.

 

D'aucuns crieront à l'hypocrisie, mais la politique, c'est cela. C'est prendre des décicisions, et en assumer les conséquences, plutôt que de céder à la panique et à la dictature du sentiment. C'est défendre l'intérêt général, plutôt que celui de quelques-uns. C'est raisonner en toute indépendance, plutôt que d'écouter les groupes de pression de la "culture de mort".

 

 

La mission refuse également  contrairement à ce qu'il avait dit au mois de mars, la dépénalisation des homicides par compassion, jugeant que les juges ou le parquet ont la possibilité de tenir compte de cette circonstance particulière. Seul bémol : on propose aussi d'en finir avec les agonies douloureuses, en autorisant la "sédation terminale" pour les patients dont on a arrêté le traitement et qui sont inconscients. N'est-ce pas la limite entre aide active et passive? Tout dépend, au final, si le but recherché est de soigner, quitte à ce que la conséquence indirecte de l'injection soit la mort, ou si le but recherché est la mort. La nuance semble ténue, mais elle est de taille!

Publié dans Société

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P
Bien heureuse conclusion pour ma part de ce rapport Leonetti malgré les mécontentements du lobby pro euthanasie. Les discours sont importants mais les actes le sont aussi. Comment expliquer qu'aujourd'hui nos places en équipe mobile de soins palliatifs soient toujours aussi précaires. Car dans cette formidable bêtise de la tarification à l'activité, nous qui sommes censés faire un travail de qualité sommes obligés de comptabiliser le nombre de nouveaux patients à l'année pour justifier de nos places (X patients nouveaux = x temps de médecins, d'infirmières, de psychologues etc.). Comment apporter un soutien à des gens en fin de vie quand déjà votre survie institutionnelle ne tient qu'à un fil (les financements alloués, la  bonne volonté des médecins pour nous faire entrer dans leurs services, l'incompréhension générale par rapport à votre propre fonctionnement d'équipe etc.)  Quant on sait que les équipes mobiles ont un grand rôle de formation et de recherche auprès des équipes et des médecins (là aussi un grand débat à faire quant on voit les résistances du milieu) et que pour assurer notre survie, dans un travail qui est déjà très éprouvant, nous sommes obligés de négliger cette fonction là pour atteindre cette "quantité" de patient ???On voudrait tuer les équipes mobiles que l'on ne s'y prendrait pas mieux... En tout cas pour moi il y a quelques choses qui cloche dans le système.LA TARIFICATION A L'ACTIVITE EST UNE ABSURDITE tout comme vouloir faire de l'hôpital une entreprise rentable. A vouloir être rentable à tout prix, nous laisserons sur le carreau nombres de personnes trop coûteuses ou pas assez bénéfiques pour nos finances. Le suicide assisté et l'euthanasie seront t'elles les réponses pour ces personnes ? J'en ai bien peur...
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M
Merci pour ce billet. Je suis du même point de vue que vous, à ce sujet. Pour moi, on doit faire en sorte de répondre à leurs appels à l'aide et non céder, à la facilité. Le recours aux soins palliatifs, est une des solutions, à explorer.Il est toujours facile de citer des exceptions pour défendre l'euthanasie mais en cédant, rien qu'une seule fois, on ouvre la boite de Pandore. Après, ça sera impossible à réguler et ça amènera des dérives de toutes sortes.<br />  <br />  
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F
J'ai écouté Léonetti au journal de France 3 à 12h30. je n'ai rien à ajouter si ce n'est partager l'avis du maître des lieux et exprimer ma satisfaction. Il faut résister à l'AMD qui n'en doutons pas reviendra à la charge.
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L
@Rubin<br /> Un argument utilitariste? Il me semble que c'est à la fois le meilleur et le pire argument des pro-euthanasie...<br /> @b.mode<br /> :) Disons qu'il vaut mieux réfléchir à deux fois avant de légiférer sur ces questions où on peut rapidement arriver à des dérives qu'on ne prévoyait pas au départ.<br /> @cilia<br /> Il est clair qu'on s'endort trop sopuvent dans le "tant que ce n'est pas dénoncé, on continue com eça", on le voit aussi en ce qui concerne l'émission des Infiltrés sur les violences sur les personnes âgées dans certaines maisons de repos ou de retraite.<br /> Ce que dit Leonetti me paraît intéressant sur les raisons de cet acharnement : on confond parfois survie et acharnement, car on a fait d'énormes progrès au niveau médical et scientifique. Mais c'est vrai que prolonger pour prolonger est stupide." Vivre ou survivre..." (air connu)<br /> Après l'ADMD va bien plus loin que cela, car ils exigent carrément le suicide assisté...<br /> @criticus<br /> Nous sommes donc d'accord; Disons que je m'interrogeais sur ce mot "sédation terminale", je ne veux pas qu'on confonde avec une injection létale car ça n'a rien à voir! C'est tout l'intérêt de la distinction euthanasie/condamnation de l'acharnement thérapeutique.<br /> @tous<br /> Je note que M. Romero n'a pas attendu pour faire parler de lui : "Jean-Luc Romero, président de l'Association pour le droit à mourir dans la dignité, regrette que "rien ne soit fait pour abréger les souffrances intolérables" des patients en fin de vie"<br /> Oui, c'est vrai, rien n'est fait. Il n'existe aucune structure. Il n'y a aucun soignant qui consacre sa vie, ses jours, ses nuits, à aider les patients en fin de vie. Leprésident de la République n'a pas demandé le doublement des structures... Des fois, il vaut mieux se taire que de dire d'aussi grosses énormités!
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C
« Seul bémol : on propose aussi d'en finir avec les agonies douloureuses, en autorisant la "sédation terminale" pour les patients dont on a arrêté le traitement et qui sont inconscients. N'est-ce pas la limite entre aide active et passive? Tout dépend, au final, si le but recherché est de soigner, quitte à ce que la conséquence indirecte de l'injection soit la mort, ou si le but recherché est la mort. La nuance semble ténue, mais elle est de taille! »<br /> <br /> Oui, la nuance est de taille, mais elle est nécessaire. Lorsque la  souffrance d'un mourant imposer de lui donner de la morphine et que cela peut lui donner la mort, on n'est plus dans l'euthanasie mais bien dans l'accompagnement vers la mort.Sur le reste, entièrement d'accord.
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