Le repos dominical plus que jamais menacé
L'information est passée quasi inaperçue, les médias s'intéressant visiblement plus au nombre des sous-marins nucléaires de la Marine française.
Et pourtant. Consulté par Renaud Dutreil, le ministre du commerce, le Conseil économique et social (CES) a approuvé hier par 143 voix sur 184 un rapport préconisant le maintien du repos dominical dans les commerces.
Sur ce sujet, plusieurs arguments peuvent être retenus : en premier lieu, se reposer le dimanche est un acquis social qu'il convient de conserver. Trop facile de dire qu'il est pratique d'aller faire ses courses le dimanche : pendant que vous faites votre shopping, les employés des commerces bossent. Deuxièmement, il paraît important de conserver un jour dans la semaine où l'on effectue une "pause commerciale". SI on peut s'abstenir d'acheter de temps en temps, ce n'est pas plus mal. Troisièmement, le dimanche est traditionnellement le jour où l'on peut se retrouver en famille, et ce n'est pas négligeable. C'est ce que le CES appelle "l'équilibre sociétal".
Mais si l'on regarde de plus près cet avis du CES, que constate-t-on? Que la CGT et FO se sont abstenues, et que la patronat (CGPME, MEDEF, UPA) a voté pour en compagnie de la CFDT, de la CFTC et de la CGC. Premier indice troublant. Et ce rapport, que dit-il? S'il réaffirme le principe d'interdiction d'ouverture le dimanche pour les commerces (il existe déjà 180 dérogations, dont les fleuristes, les restaurateurs et hôteliers,les commerces de tourisme et les commerces alimentaires jusqu'à 12h30), il étend en réalité le nombre des exceptions.
Tous les commerces pourraient disposer de cinq dimanches d'ouverture exceptionnelle par an. Alors que pour le moment, seuls les maires peuvent autoriser une branche d'activité (les grands magasins, les magasins d'habillement, les magasins de tongs...) à ouvrir cinq dimanches par an. Deuxième proposition, dans les zones dites touristiques, tous les commerces auraient le droit d'ouvrir. Enfin, les commerces alimentaires auraient une demi-heure de plus (jusqu'à 13h).
Des propositions qui expliquent l'abstention de la CGT et de FO, qui estiment que ce rapport aura pour conséquence d'augmenter le nombre de salariés bossant le dimanche. D'ailleurs, Renaud Dutreil s'est empressé d'annoncer qu'il prendrait au plus vite, et peut-être même avant la présidentielle, un décret qui confirmerait ces propositions.
En guise d'avertissement, récemment, deux zones commerciales (dans les Bouches du Rhône et les Yvelines) ont obtenu - contrairement à des décisions de justice qui leur déniaient ce droit - une autorisation préfectorale permanente d'ouverture le dimanche... Le sens de l'histoire semble décidément de revenir, une par une, sur toutes les réformes positives adoptées au XIXe siècle pour règlementer le travail...
Si Nicolas Sarkozy s'est prononcé pour une libéralisation complète sur ce sujet, les autres candidats ne se sont pas encore prononcés. Ils préfèrent se tromper sur le nombre de sous-marins nucléaires?