L'Union européenne fait tout pour qu'on la déteste

Mais un sujet plus grave nous préoccupe, dont la Lettre volée s'est fait l'écho à la suite de Backchich : l'Europe continue avec obstination à vouloir périodiquement se tirer de nouvelles balles dans le pied, histoire de bien freiner sa marche en avant. Histoire d'être sûre de ne servir à rien. Bref, l'Union européenne fait tout pour qu'on la déteste et qu'on cesse de croire en elle, si ce n'était pas déjà fait.
De quoi s'agit-il, cette fois? Un rapport des services du commissaire européen à l'élargissement, publié début novembre, préconise d'accélérer le processus d'adhésion de nouveaux Etats membres, dans le but de parvenir rapidement à une Europe à 35. Huit pays sont visés : la Turquie, bien sûr, la Macédoine, la Croatie, la Serbie, l'Albanie, la Bosnie-Herzégovine, le Monténégro, et pourquoi pas le Kosovo!
Il y a encore cinq ans, avant l'élargissement de mai 2004, l'Europe comptait 15 pays membres. On a englobé dix Etats de l'est d'un coup en 2004, d'un seul, avant d'en intégrer deux autres autres (Roumanie-Bulgarie) en 2007. Entretemps, l'Union européenne a montré ses limites : faut de réussir à définir ensemble un objectif commun, c'est la zizanie. Les échecs du TCE puis du mini-traité en sont la preuve. L'union européenne a cessé de faire rêver en-dehors du cénacle des élites bienpensantes. Et on voudrait persévérer dans cette voie suicidaire? Continuer de privilégier le nombre à la qualité, alors que l'expérience montre que c'est un désastre?
Une seule chose compte pour les auteurs du rapport : s'élargir pour s'élargir, avec un fond de bisounoursisme en arrière-plan. "Enlargement is one of the EU's most powerful policy tools. It serves the EU's strategic interests in stability, security, and conflict prevention", écrit-on. Ainsi donc, élargissons-nous aux Balkans, pour assurer la paix et la stabilité dans cette région. Etendons-nous à la Turquie pour ancrer ce pays dans l'Occident. Et demain, proposons cela aux pays du Caucase, pourquoi pas? A l'Arménie, à la Géorgie? Et en Afrique, pourquoi pas le Maghreb? Et soyons fous, tentons notre chance au Proche-Orient! Après tout, cela pourrait empêcher les méchantes guerres de prospérer...
Au-delà de cet emportement romantique qui sert de prétexte officiel, Backchich voit une autre justification plus terre-à-terre à cette fuite en avant : "Les auteurs du rapport soulignent aussi l’aubaine économique et commerciale que représente un élargissement de l’Europe à huit nouveaux pays. Intégrer les Balkans et la Turquie, c’est repousser très loin les frontières du supermarché intérieur et du libéralisme… Peu importe de savoir comment articuler le fonctionnement politique d’une Europe à 35. Ce n’est pas le propos de la Commission à l’élargissement. Quant au fait que le traité de Lisbonne censé garantir le bon fonctionnement d’une Europe à 27 ne soit pas encore validé par tous les États membres, cela figure comme le cadet de ses soucis."
Sans compter les quelque 7,5 milliards d'euros gaspillés distribuées généreusement à ces pays, entre 2007 et 2001, afin de les aider à se préparer à nous rejoindre!
Quelle entreprise accepterait de nouvelles commandes avant d'être certaine de disposer d'une gestion correcte de son activité présente? C ommençons par définir convenablement le cadre avant de vouloir élargir la famille!