Le sadomasocialisme à l'épreuve de l'Europe

Publié le par Le chafouin

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Les observateurs ont eu tendance à souligner, ces derniers jours, la réussite du sommet européen de Bruxelles sur les institutions communautaires. En dépit, comme l'analyse très justement Versac, des
paradoxes de cette soi-disant victoire et des médiocres avancées qu'elle offre. Pour le détail, voir ici.

"Qu'a-t-on obtenu samedi matin ? A peu près la même chose que ce les Français ont refusé il y a deux ans. La cohérence et les progrès identitaires (le nom constitution, les symboles) en moins. On garde l'essentiel des avancées institutionnelles, ce qui est un vrai plus, et qui constituait l'essentiel du texte. On perd la cohérence de l'unification de tous les textes en un seul, on perd le symbole de l'idée de constitution."


Les nonistes ayant refusé l'idée de voir "graver dans le marbre", selon l'expression consacrée, le principe de la "concurrence libre et non faussée" seront certes agréablement surpris de voir cette mention retirée de la négociation finale. Mais son principe continuera vraisemblablement de présider aux destinées de l'Union, ne rêvons pas. Quant à la partie III du texte, sur laquelle se sont basés moultes "non" et que l'on pourrait appeler l'esprit "libéral" des institutions, elle est retirée de ce mini-traité mais existe toujours du fait de l'"empilement des traités initiaux".

Les anti-libéraux ne seront donc toujours pas satisfaits de ce résultat. Non plus que les souverainistes, qui auront beaucoup de mal à être un jour satisfaits par un accord européen.

Mais la frange véritablement pro-européenne des nonistes, ceux qui ont cru - à tort - que leur "non" pourrait faire bouger les choses, ceux qui ont craint un reflux de l'idée unioniste, ceux-là doivent se féliciter de ce mini-traité. On comprend très bien, dans cette optique, que Jean-Luc Mélenchon continue de râler : "En dépit de toutes les alertes données par les votes négatifs des citoyens ou le niveau de leur abstention, le texte discuté par le Conseil européen a été tenu secret et amendé dans le dos des citoyens et des Parlementaires. On en revient à la méthode intergouvernementale qui paralyse l’Europe depuis plusieurs années et la condamne au plus petit commun dénominateur libéral ». Les Mélenchon, comme les Besancenot, les Arlette et tous ceux qui disent éternellement non, ont bien compris que ce mini-traité ne répond en rien à leurs angoisses, à leurs doutes, à leurs réticences au sujet de l'Europe qui pour eux, ne sert qu'à broyer encore et toujours du travailleur.

Mais comment supporter que Ségolène Royal, François Hollande ou Julien Dray, qui ont soutenu le TCE, critiquent le résultat du sommet? La montagne accouche d'une souris mais devrait représenter pour eux une avancée par rapport au désastreux traité de Nice, et surtout, au souvenir de la pseudo onde de choc consécutive aux "non" français et néerlandais. Comment interpréter ce revirement, à part comme une basse manoeuvre politique? Quelque chose doit nous échapper. En 2005, Hollande estimait que Fabius changeait d'opinion en fonction de ses intérêts personnels. Aujourd'hui menacé, le premier secrétaire du PS, reprenant la "mini-ambition" fustigée par son ex-compagne devenue rivale (nous dira-t-elle dans quelques semaines qu'elle ne croyait pas à ce qu'elle dit aujourd'hui?), dénonce «une Europe a minima et l'abandon d'un grand projet collectif même s'il faut sortir l'Europe de son impasse et de son marasme», L'abandon d'un grand projet collectif? Où ça? Et Julien Dray n'est-il pas lui aussi ridicule lorsqu'il lâche sans sourciller que "L’Europe continue sa dérive libérale" et qu'on ne peut accepter ce "compromis boiteux"? Même Laurent Fabius, qui était en 2005 à la pointe des nonistes, a préféré "attendre avant de juger".

Face à ce néant d'idées, on est plutôt tenté d'abonder dans le sens de Nicolas Sarkozy, une fois n'est pas coutume, lorsque ce dernier affirme que  "l’Europe qui ne bougeait plus s’est remise en mouvement ». C'est un fait.
Si l'on se met dans la peau d'un socialiste ayant voté oui en 2005, on est plutôt tenté de saluer le pragmatisme d'un DSK, cité par Jean Quatremer : « Je ne suis pas satisfait du résultat parce que c’est très cher payé pour avancer, mais il faut quand même prendre le bon côté : on a avancé ».
On est plutôt tenté d'approuver l'illusionniste Jack Lang : « Ce nouveau traité sera moins ambitieux que le traité constitutionnel mais il ne pouvait pas en être autrement après les deux rejets français et hollandais ».

Malgré ces déclarations de bon sens, le sadomasocialisme semble une nouvelle fois reprendre le dessus au PS. Mais l'a-t-il jamais quitté? On avait l'impression que le mini-traité ménageait l'Angleterre et la Pologne, tout en laissant la possibilité aux autres Etats d'aller plus vite, plus loin, plus fort. N'est-ce pas ce que devraient vouloir les socialistes? Mais que veulent-ils au juste? Le fait qu'une partie de leurs dirigeants, le jour même où ils entérinent leur calendrier de leur réforme interne, crient ainsi haro sur le baudet n'est pas bon signe. Pour la refondation, faudra sans doute repasser messieurs-dames.

 

Publié dans Europe

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L
@cri du peupleJ'espère bien! ceci dit il est assez mauvais signe de voir que de nombreux poids-lourds du pS (peillon hollande royal dray et j'en passe) rejoignent Mélenchon sur ce terrain... On croit vraiment rêver! ou cauchemarder, plutôt. LEs mêmes disaient en 2005 qu'en matière d'Europe, il ne fallait pas prendre en compte les enjeux politiques nationaux...
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L
Mélenchon le soir du deuxiéme tour des législatives jubilait parce qu'avec ses 230 sièges la gauche pourrait faire barrage au traité allégé de Sarko (un traité devant être en effet selon lui approuvé à la majorité qualifiée des trois cinquiémes)....mais c'était oublier qu'une majorité de députés socialistes avait approuvé le Traité sur la constitution européenne. Et donc que ce soit par conviction ou par cohérence ils ne pourront pas voter contre un traité allégé 0% sujet qui fachent. Tenir et Résister
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P
Il tente de vous amadouer avec des compliments. Gazez jvous dis, gazez... ;)))
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L
Ah tu vois potage qu'il n'y avait pas besoin d'utiliser des gaz lacrymos!
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W
très bon article !
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