Et maintenant, comment Rachida Dati peut-elle se maintenir?

Publié le par Le chafouin

Quel fiasco pour celle qui il y a moins de deux ans, était considérée comme l'enfant-prodige de la Sarkozie triomphante! Rachida Dati, dont la promotion fut aussi fulgurante que l'éclair, a épuisé en très peu de temps son capital politique, et n'a jamais été dans une situation aussi délicate après une journée de mobilisation où les magistrats et les personnels du monde de la justice et de la pénitentiaire ont fait la preuve de leur rejet total de la politique menée par le garde des Sceaux.

Malaise, vous avez dit malaise? Le mot est faible, et même inadapté, à lire les témoignages récoltés par Maître Eolas, qui a eu une intuition de génie avec son opération "23 octobre", que Narvic a tôt fait d'ériger en preuve définitive de l'incapacité des médias "traditionnels" à saisir et retransmettre les raisons profondes de cette défiance des juges. C'est aller un peu vite en besogne, mais lisez-les, lisez- celui-là, vous verrez le signe d'une révolte, d'une colère, qui n'ont rien de corporatiste, mais qui trahissent plutôt un rejet total de la politique menée par Rachida Dati. Et de sa personnalité, ne l'oublions pas...

Un ras-le-bol des méthodes de l'exécutif, de son empiètement sur le pouvoir judiciaire. Une réponse implacable suscitée par un pouvoir qui navigue à vue, avec des mesures tantôt spectaculaires, pour répondre précipitamment à un fait divers, tantôt d'apparence libérales, avec des idées confinant parfois au ridicule ou à l'absurde. On fait en sorte qu'un maximum de gens soient condamnés, et ensuite, on se débrouille pour qu'ils n'effectuent pas leur peine. Schyzophrène!

Le contexte de pression carcérale inédite et la grogne des services pénitentiaires, qui se sentent oubliés du projet de loi pénitentiaire, n'arrangent pas les choses pour la ministre. On ne peut pas à la fois vouloir sécuriser la France et diviser par deux le nombre de policiers, de juges, de surveillants de prison... Ce texte fondateur, qui doit être discuté à partir de janvier à l'Assemblée, est généreux avec les prisonniers et multiplie les alternatives à l'incarcération, mais fait l'impasse totale sur un sujet pourtant essentiel : la psychiatrie.

Dès lors, quel autre avenir que la démission pour Rachida Dati? La pression est énorme sur les épaules d'une femme qui ne semble décidément pas taillée pour un poste qui demande rondeur, expérience et mesure. Des qualités dont manque à l'évidence la garde des Sceaux. Nicolas Sarkozy laissera-t-il tout un pan de la politique sécuritaire du pays (prisons et tribunaux), que Malakine voit globalement dans l'impasse, aller à la dérive? Laissera-t-il en poste une ministre aussi affaiblie et illégitime?

Publié dans Politique

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L
@ericVosu pourrez dire ce que vous voudrez, je n'ai pas souvenir d'un ministre de la Justice aussi rejeté. Bien sûr, elle applique la politique de Sarkozy, mais avec quelle méthode? Darcos réussit bien mieux.@XerbiasLes faits, et notamment la réunion d'hier entre Sarkozy et les magistrats - en présence de Dati- semblent te donner raison pour le moment : sarkozy ne la démissionnera pas. Mais ce que je dis, c'est qu'elle n'a plus le poids politique pour assumer son ministère...Je ne comprends pas trop c que tu dis au sujet de Portelli...
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X
Chafouin, je pense aussi que la droite doit pouvoir trouver mieux que Rachida Dati pour le ministère de la Justice. Seulement Sarkozy ne procèdera pas à une humiliation publique de celle-ci en la virant seule du gouvernement, si tant est qu'il partage cette analyse. Car au-delà de Dati, il y a un problème de fond : ce n'est pas tant ceux des moyens, ceux-ci augmentent constamment depuis des années, même s'il reste du chemin à faire. C'est plutôt celui de la remise en cause des décisions prises par l'exécutif et le législatif par le pouvoir judiciaire. Je viens d'entendre Serge Portelli à Ripostes, et je m'interroge vraiment sur ce rejet d'une politique qui atteint leur façons de faire plus qu'elle n'attaque les magistrats en eux mêmes.
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E
Dati n'est pas autre chose qu'un bon soldat parfaitement discipliné. Elle avance droite comme un "I" sur les objectifs définis par le palais, point barre.Qu'il s'appelle Pierre, Paul, Jacques ou Simone, ce que les syndicats de magistrats refusent est contenu dans un seul mot : ministre.Sans rentrer dans l'analyse de son action et de ses mesures, il faut rappeler qu'au lendemain de sa nomination, Rachida Dati recevait en guise de bizutage, un dézingage en règle de tout ce que la magistrature de ce pays contient de syndicats influents.Entre les vraies doléances d'une justice qui se délite de jour en jour, et les excès d'un corporatismes exacerbé que plus personne ne conteste, il est difficile de faire le tri.Xerbias a raison. D'un coté les gentils, de l'autre les méchants.Devant cette équation, le gouvernement a décidé de passer en force. Dati en a été le bélier, elle en sera aussi le fusible... comme tous ses prédécesseurs.
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E
Monsieur Chafouin, le communautarisme sera le fait marquant du 21e siècle, que cela vous plaise ou non, cela se fera.Autant se préparer aux formidables défis à relever dans votre pays et sur nos terres, car personne ne peut remonter à la nage les chutes du Niagara.
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L
@XerbiasLe fait que les juges ne se remettent pas en cause, jamais, et surtout pas ici, n'est en effet pas une surprise : on pourrait leur répliquer qu'il existe de nombreux exemples où les effectifs et la pression de l'exécutif n'expliquent pas des jugement plus qu'étranges. Voire scandaleux. Le loupé au sujet du violeur remis en liberté n'en fait pas partie, à mon sens : errare humanum est. En tant que journaliste, j'entends fréquemment des policiers s'interroger sur des décisions contestables : ils le font aussi pour des raisons corporatistes, mais cela pose question tout de même.On avait eu, à Lille, un fiasco assez marquant il y a quelques semaines: pendant tout un week-end, le juge des libertés et de la détention, qui décide des détentions provisoires, était une juge civile (une juge aux affaires familiales, si je me souviens bien) et elle avait laissé des délinquants dangereux, arrêtés après des mois et des mois d'enquête, en liberté. Ce genre de ratés, les billets de chez Eolas évitent soigneusement d'en parler. Mais ce n'est aps pour ça qu'il ne faut pas tenir compte du fond du message des magistrats : on ne peut pas gérer la justice, comme d'autres administrations régaliennes, d'un seul point de vue comptable. ET on ne peut pas à la fois dire qu'il faut condamner à tour de bras, et en même temps ne pas assumer derrière avec les prisons.Moi je raisonne politiquement : vu la façon dont elle gère les choses (absence au congrès du syndicat de la magistrature, refus de rencontrer les syndicats pénitentiaires, je vois mal comment cette ministre-ci a désormais le crédit nécessaire pour continuer les réformes dont justement on a besoin dans ce pays. Il faut une poigne éclairée à la tête de ce ministère. Totu en sachant que de toute façon, Rachida Dati ne fait effectivement qu'appliquer la politique voulue par l'Elysée dans ce domaine.@AymericNon, j'ai été étonné mais ils ne m'ont contacté qu'après, en me demandant si je voulais recevoir un exemplaire par courrier. Ils parlent effectivement d'une rémunération, mais rien n'est négocié, c'est étrange...Je ne tiens pas compte de ce que Rachida Dati représente en terme de diversité. Cela ne doit pas faire partie de ce débat... J'en ai un peu marre, comme tu le dis d'ailleurs toi même, qu'on divise la France en communautés... Rachida Dati ne représente aucune communauté, elle est elle-même et c'est tout.
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