Faut sauver le modèle social, mais pas question d'y contribuer!

Publié le par Le chafouin

Il y a une excursion à faire, en ce moment. Au moins par souci ethnologique. Allez faire un tour chez les Vigilants. L'obsession de ces blogueurs se revendiquant comme les "phares" de notre société : Nicolas Sarkozy. Qui a forcément tort sur tout, tout le temps, quoi qu'il dise, quoi qu'il fasse. Nos aimables militants de la gauche de la gauche, qui ne manquent d'ailleurs pour certains pas de talent, se prennent pour de véritables résistants des temps modernes. Eux, au moins, ils auront dénoncé le tyran à temps. Grâce à eux, on en pourra pas dire qu'on ne savait pas! Merci à eux. Vraiment.

Depuis quelques semaines, je lis une partie d'entre eux, assidûment. Plus que les blogs libéraux que je fréquente tout aussi régulièrement, ils sont littéralement excités par le mouvement social en cours (d'achèvement?). L'odeur du fumigène, du piquet de grève, de la saucisse grillée sur le barbecue, sans doute. L'amour de ces chansons ringardes qu'on entend dans les manifs. Bref, on assiste à une véritable radicalisation verbale, qui n'est d'ailleurs pas inintéressante à observer et analyser. Parce que les mots ont un sens, que leurs auteurs ont une responsabilité et de là à ce que les actes suivent, il suffirait de presque rien.

Deux posts, trois posts, quatre posts par jour, une avalanche de courageux articles pour dénoncer le traitement médiatique du mouvement des cheminots, la démagogie du gouvernement, l'égoïsme des usagers en colère (sic). Pour démonter (parfois avec un certain brio) les arguments des "salauds de patron". Classe contre classe, comme au bon vieux temps. Mais aussi pour tenter d'approfondir le coeur du débat : les retraites. Souvenons-nous, c'est ça le sujet. Les cheminots, c'est un détail.

Le blog Sabotage, dont le nom pourrait à lui seul inspirer un roman, fournissait hier un exemple-type de l'opinion de la gauche de la gauche (on devrait sans doute plutôt dire : la vraie gauche) face au problème incontournable du vieillissement de la population et de la disproportion grandissante entre les nombres d'actifs et d'inactifs :

La productivité augmente plus vite que l'espérance de vie. Donc la richesse existe pour financer largement cet allongement de l'espérance de vie. Simplement il y a un choix politique idéologique: laisser les capitalistes, les actionnaires, les possédants, accaparer cette richesse supplémentaire au lieu de la distribuer à ceux et celles qui ont contribué à la produire.

L'argument n'est pas si idiot que cela : on a un problème de financement de notre système, qui ne durera pas comme les contributions, alors autant aller chercher l'argent où il se trouve : chez les riches. Pas si idiot, mais un peu pervers. C'est fou, cette attitude qui consiste à toujours, sans cesse, dévier le problème sur les "salauds de riches". Qui sont forcément les méchants, les ennemis. L'obsession. Notez qu'il ne s'agit pas ici de dédouaner les plus fortunés de leur responsabilité. Je précise que je ne suis ni rentier, ni chef d'entreprise, ni golden boy. Les "classes dominantes" doivent contribuer plus que les autres au bon fonctionnement de la société, certes. Mais proportionnellement, pas d'avantage. Pas de raison. On sait d'ailleurs où a déjà mené ce réflexe de classe : à massacrer, sans vergogne, les koulaks du temps du bon vieux Lénine.

Et puis, le système de répartition doit continuer à se suffire à lui-même. Il le peut. Simplement, comme il y a moins d'actifs, plus de "passifs", on doit tous commettre de petits sacrifices. On ne voit pas bien ce qu'il y a de réactionnaire là-dedans. Ce n'est pas de la "propagande", ce mot directement issu des Soviets (accolé généralement, à l'époque, du terme impérialiste que pas un vigilant ne renierait) et qu'on voit fleurir chez nombre de nos Phares Bretons. Certains sont prêts à taxer d'avantage les riches, ils trouvent cela normal, mais refusent le principe de travailler deux malheureuses années et demi de plus. C'est quoi, deux ans et demi, sur une carrière de quarante? En sachant qu'au bas mot, derrière, on a encore trente, voire quarante années à profiter de l'oisiveté, de Thalassa, des Chiffres et des Lettres?

Pas logique. Pas normal. Les mêmes qui veulent conserver à tout prix leur modèle social ne veulent rien faire pour y contribuer. Mais bon, pour certains, comme ce rédacteur du blog The Vast Left Wing Conspiracy, on est prêt à soutenir "le mouvement jusqu'au bout" et "tout autre mouvement social qui suivra : tous les mouvements sociaux de salariés, indépendamment de ce qu'est leur pretexte immédiat (que tout le monde oublie bien rapidement par la suite)". Forcément, quand on n'a pas le même référentiel... Difficile de se comprendre.

En attendant, on peut se retrouver tous une minute autour d'un tube anti-capitaliste :

 

Publié dans Chafouinage

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L
@Sabotage :L'argument est un peu plus bas : "le système de répartition doit continuer à se suffire à lui-même". Le système hérité de 1946 est le siuvant : les salaires des actifs contribuent aux pensions des retraités.Il faut se débrouiller avec ça.  Taxer les riches ou les actionnaires (comme le sous-entend votre article) est hors de propos. D'ailleurs, si vous étiez honnêtes, vous sauriez que les riches sont déjà bien plus taxés que les pauvres. Qu'ils paient plus d'impôt à tous les niveaux. Ppurquoi cette haine du riche, pourquoicroire que toutes les solutions ne viennent que de lui? Il me paraît juste, en ce qui concerne les retraites, que l'ensemble des salariés cotisent soient d'avantage, soit plus longtemps. ça ne m'amuse pas plus que vous, d'ailleurs... Mais c'est la vie!
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S
"L'argument n'est pas si idiot que cela : on a un problème de financement de notre système, qui ne durera pas comme les contributions, alors autant aller chercher l'argent où il se trouve : chez les riches. Pas si idiot, mais un peu pervers. C'est fou, cette attitude qui consiste à toujours, sans cesse, dévier le problème sur les "salauds de riches". Qui sont forcément les méchants, les ennemis. L'obsession. Notez qu'il ne s'agit pas ici de dédouaner les plus fortunés de leur responsabilité. Je précise que je ne suis ni rentier, ni chef d'entreprise, ni golden boy. Les "classes dominantes" doivent contribuer plus que les autres au bon fonctionnement de la société, certes. Mais proportionnellement, pas d'avantage. Pas de raison. On sait d'ailleurs où a déjà mené ce réflexe de classe : à massacrer, sans vergogne, les koulaks du temps du bon vieux Lénine."L'arguement est quasiment inexistant : la seule répartie qui est faite à notre article, c'est l'idée qu'on dit "salaud de riche" (ce qui n'est pas bien). Mais rien pour contrer l'idée que prendre l'argent là où il est est plus facile et plus juste que le prendre là où il n'est pas - ce qui revient au système féodal.
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L
Je pense que Nico n'a pas fait gaffe, tiens je vais lui poser la question... Quand à peuples, c'est vrai que la photo de son gosse, c'est limite. Mais tu ne devrais pas sous-estimer les Vigilants : certains écrivent avec talent et ils martèlent tellement leurs messages, avec tellement de force, qu'ils seraient fichus de convaincre des gens.
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C
Maintenant, je regrette moins qu'il ait quitté Kiwis... tu imagines, s'il y avait eu association entre les deux ? Quant à Peuples, j'avoue que je crains assez peu un type qui met la photo de son gosse pour parler politique. Et puis, bon, quand on rejoint un tel réseau, il y a du souci...
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L
@criticusJe me demande bien ce que Nico fait là-dedans...Quant à peuples, attention à toi si tu ne veux pas te faire briser une nouvelle fois! ;)
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