Travail dominical : je ne vois pas trop où est le recul?

Publié le par Le chafouin

Je ne comprends pas pourquoi la fronde s'arrêterait à l'UMP sur le travail dominical. Hier, les députés rebelles ont été reçus à l'Elysée, où ils ont visiblement été achetés rassurés par le président de la République : il n'y aura pas de généralisation du travail dominical. Décidément, on recule plus facilement face aux lycéens que face à ses députés!

Et là, on sursaute : parce qu'il y avait une généralisation prévue? Pourtant, on entend les ministres Xavier Bertrand et Luc Chatel clamer, depuis le départ, qu'il n'en était pas question? Passons.

Pour ceux qui ne suivent pas, au fond de la classe, rappelons le résultat de l'entretien. D'abord, chaque maire pourra décider d'autoriser jusqu'à dix dimanche travaillés dans sa commune, contre cinq actuellement. Sans que les commerces alimentaires soient concernés. Ce qui nous promet de toutes façons quelque chose de comique : soit il y aura une belle inégalité entre les commerçants ou les clients, selon la couleur politique de la ville en question, soit on se prépare à de beaux retournements de veste schyzophrènes au PS. J'attends avec impatience, par exemple, de voir ce que ferait Martine Aubry à Lille, si la loi passe en l'état : hier, au conseil municipal, elle a fait voter une motion de principe refusant l'extension du travail dominical.

Pour moi, il ne s'agit pas là d'un recul, mais d'une extension. Le texte initial ne prévoyait pas de passer de 5 à 52 dimanche ouvrés, si je ne m'abuse? Conclusion : on prend cette disposition pour que les centre-villes ne soient pas trop défavorisés par rapport aux zones commerciales. Une course à l'échalote qui ne me dit rien qui vaille.

Deuxième modification : justement, à propos de Lille, les magasins seront autorisés à ouvrir chaque dimanche sans restriction "dans les agglomérations des "zones frontalières" d'un pays ouvrant lui-même le dimanche". Tiens tiens, coucou Martine Aubry!  La Belgique laisse ses commerces ouvrir tous les dimanche, donc le Nord me paraît être le seul concerné par cette disposition. Disposition qui semble aussi un brin inégalitaire, puisque le salarié lyonnais aura droit au repos dominical mais pas le Lillois. Le conseil constitutionnel sera-t-il d'accord?

Là encore, à part faire plaisir aux élus de la droite lyonnaise, je ne vois pas où est le recul. Car en même temps, on veut "étendre le champ de l'ouverture dominicale" dans les zones dites touristiques, dont le périmètre sera élargi. Il y en a, à Lyon! Que recouvre exactement la notion de zone touristique? Qui décidera de leur définition? Peut-elle subrepticement se substituer à la notion initialement défendue de "zone d'attraction commerciale exceptionnelle"Pour ce qui est du Nord, en tout cas, c'est pire qu'avant cet entretien à l'Elysée. Là, il y aura bel et bien généralisation.

Là encore, où est le recul?

Concernant Marseille, on marche sur la tête : on propose d'entériner législativement un "usage constaté" pour autoriser l'ouverture aujourd'hui illégale des centres commerciaux tels que Plan-de-Campagne (Bouches-du-Rhône). Et ça, c'est pour contenter l'auteur du texte, Richard Mallié (lui-même député dans le 13), et pour ne pas compromettre sa réélection. Et le petit dealer du coin, qui vend du cannabis, il a droit à un "usage constaté", lui, ou pas?

"La feuille de route est tracée. Le dialogue va se faire. On s'est complètement éloigné de la généralisation du travail du dimanche. Il existe des avancées notoires, nous avons été entendus, je m'y retrouve", a expliqué un député frondeur. Un autre l'avoue franchement : "Si ces avancées sont maintenues, on est en mesure de voter le texte sans difficulté".

Mais quelles avancées notoires? Le fond du sujet n'était-il pas le risque pour la cohésion sociale et la vie de famille, messieurs les députés UMP? Le fond du débat, était-ce Lyon, ou était-ce le principe d'extension du travail dominical? Ne disiez-vous pas qu'il fallait arrêter de tout voir par "le bout de la lorgnette" de l'économie?

Au final, si l'on en reste là, seule la gauche se battrait donc contre ce texte, dont l'examen doit commencer aujourd'hui ou demain à l'assemblée nationale. 4 000 amendements ont été déposés pour le moment : de quoi promettre une vraie bataille parlementaire!

Publié dans Société

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L
@uchimuzuVous répétez des arguments avec lesquels tout le monde est d'accord, mais une fois qu'on a dit ça, a-t-on résolu le problème du volontariat, du salariat, et du danger représenté par l'extension voire la généralisation du travail dominical?Personnellement, le fait uqe ça ne dérange personne au Japon ne m'émeut guère...@CriticusC'est ce que tu aimerais entendre mais ce n'est pas le cas. Du moins pas de façon déterminante. Et si je ne suis pas sûr des effets que ça aura, au moins, je me questionne, ce qui ne me semble pas être le cas de grand-monde, dans cette discussion.@AdrienForcer les gens à se reposer en même temps, non. Mais faire en sorte qu'il existe des périodes de repos commun, où on peut organiser des choses en société, si. Vosui est-il déjà venu à l'esprit que le jour où chacun aura des repos différents, tout sera plus compliqué? Quand quelqu'un se mariera, il ne pourra pas compter sur tous ses amis : certains bosseront le lendemain.Les vacances, ça n'a rien à voir. On peut justement poser ses jours quand on veut et s'arranger en famille."laissez choisir tout le monde, ou ne laissez choisir personne. N'est-ce pas ça, l'égalité ?"Je me fiche de l'égalité, franchement. Ce qui compte, pour moi, c'est avant tout la liberté et je ne crois pas qu'on soit libre dans les conditions fixées par cette loi. Vous partez de cas particuliers, rares, exceptionnels, qui rêvent de travailler le dimanche, pour exiger de la sciété qu'elle vous laisse aller faire vos courses le dimanche.Jusqu'à preuve du contraire, la boutique de souvenirs peut ouvrir quand ça lui chante, vu qu'elle est dans une zone touristique (sans cela, aucun intérêt de vendre des souvenirs) : mauvais exemple. Et puis, votre patn-martyre se contentera-t-il d'être seul à bosser?Je vous rappelle par ailleurs qu'en province, nombre de commerces sont fermés le lundi. Amusant non? Pourquoi n'ouvrent-ils pas plutôt le lundi s'ils veulent répartir la masse d'achats sur la sqemaine?Enfin, les petits commerces sont le mauvais exemple, car c'est typiquement ceux qui les jours fériés ou les dimanches, n'ouvrent que parce que les gros ouvrent, et qu'ils ne veulent pas rater l'occasion d'une vente. elle est là, la réalité.L'argument sur le vote des noirs est en effet provocateur et n'a pas lieu d'être. Aucun, mais aucun rapport. Si vous croyez que la loi Mallié restera dans l'histoire comme qq chose de libérateur, vous délirez complètement! ;)" 33% veulent travailler le dimanche et ils doivent se taire ? Mais dans quelle démocratie vit-on ?"Là encore aucun rapport. ON prend en compte l'avis des minorités dans le pays (quoi que, à l'assemblée, elle doit juste se taire! mais dans quelle démocratie vit-on?) mais ça ne veut pas dire que l'on doive généraliser cet avis. Et 33% des gens sont prêts à bosser le dimanche. Je vous assure qu'entre ça et la décision, il y a un pas."Quant-au triomphe de l'individualisme, au risque de vous choquer, c'est bien la tendance générale souhaitée, et depuis un moment"Oui, et bien ce n'est aps pour cela que je m'en satisfait. Je lutterai toute ma vie contre cet individualisme qui se retourne contre l'individu. ça ne me choque pas, ça me révulse.
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U
J'ai vécu plusieurs années au Japon, où les commerces qui le désirent sont ouvert le dimanche. Cela ne semble gêner personneCela permet par exemple à des étudiants de trouver des petits boulots pour, par exemple, faire des voyages à l'étranger et découvrir le monde.Cela permet aussi aux gens qui travaillent beaucoup en semaine de prendre le temps de s'organiser comme ils le veulent le week-end.
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A
Mais bon sang, pourquoi voulez-vous forcer les gens à se reposer en même temps ??? D'où vous vient cette idée étrange que tout le monde veut se reposer le même jour que les autres ? Je ne vous vois pourtant pas militer pour que les vacances de tous soient en même temps ! Et pourtant, en suivant votre raisonnement, autoriser les gens à partir en vacances en décallé, c'est le début de la destruction du tissu social, des liens entre les individus, et tout ce qui s'en suit, au même titre que le travail le dimanche.Bref, laissez les gens choisir ! Si ils veulent vivre en décallé, laissez-les faire ! Vous êtes bien heureux de voir SOS Médecin débarquer chez vous au milieu de la nuit, y compris le week-end. Eux aussi ont choisi de vivre en décallé. Il en va de même pour les autres : laissez choisir tout le monde, ou ne laissez choisir personne. N'est-ce pas ça, l'égalité ?"je veux le faire, on doit me laisser faire", certainement pas. Mais "je veux le faire, ca n'a pas d'impact négatif sur la société, ca n'a pas d'impact négatif sur mon intégrité physique (ni morale, puisque je le choisis), et ça peut me permettre d'améliorer ma qualité de vie, on doit me laisser faire" me parait plus que défendable.On parlait plus tôt de salariés d'Ikea. Mais pensez au petit commerce, à la "boutique de souvenirs" dont le vendeur est aussi patron et propriétaire. Le tourisme "du week-end" peut lui rapporter beaucoup (par exemple avec les anglais qui ne sont qu'à 2h de train, pour ne citer qu'eux). Mais voilà, le dimanche, c'est fermé, il n'a pas le droit de gérer son affaire comme il l'entend. Il pourrait fermer le mardi et mercredi, quand il n'y a que peu de client, mais voila, c'est dimanche, et puis c'est tout. "commencez par rémunérer correctement" n'a aucun sens, puisqu'il n'est pas salarié, mais bien propriétaire et patron : ses revenus sont liés à ses ventes, et l'interdire d'ouvrir le dimanche, c'est lui interdire d'augmenter ses revenus, donc son salaire. Au nom de quoi voulez vous lui interdire le choix (et il l'aura, puisque patron) de préférer des rentrées d'argent supplémentaire à une vie sociale ? Pourquoi ses valeurs seraient-elles les votres ? Et si elles sont différentes, pourquoi refusez vous de considérer son choix comme aussi valable que le votre ?Aller, un argument "pure provocation", mais j'avais quand même envie de le lancer : parce qu'il y a un siècle, les noirs n'avaient pas le droit de vote et qu'ils étaient minoritaires, fallait-il continuer à leur interdire ? Pourtant, certains s'abstiennent toujours (donc ont fait le choix de ne pas voter malgré la possibilité qu'on leur donne), et ça a fini par se "retourner" contre les blancs en ammenant un noir à la maison blanche ... (et qu'on ne me traite pas de raciste, je ne sous-entend absolument pas que cela soit une mauvaise chose ...)Je suis aussi scandalisé que vous considériez 1/3 de la population comme des "cas isolés". 25% de la population vote PS aux élections présidentielles, ils ont voix au chapitre, 33% veulent travailler le dimanche et ils doivent se taire ? Mais dans quelle démocratie vit-on ?Quant-au triomphe de l'individualisme, au risque de vous choquer, c'est bien la tendance générale souhaitée, et depuis un moment. La déclaration des droits de l'homme, et tout ce qui va autours, n'ont que ce but : accroitre les libertés individuelles au détriment des décisions de société. Ce qui n'est pas abherrant, d'ailleurs, la société n'étant pas une entité en soi mais un rassemblement d'individus.D'ailleurs, combien de gens s'opposent au travail du dimanche, mais montent aux créneaux lorsqu'on parle de sélection à l'université ? Le libre choix des filières d'étude est non seulement largement sous-optimal du point de vue de la société (et donc mauvais pour les individus, puisque chomage et tout ce qui va avec du fait de la non-adéquation des diplomes et des emplois), mais aussi extremement couteux pour l'état (et par conséquent, pour les citoyens). Et pourtant, quand cette possibilité de choix est remise en cause, on brandit l'étendard des libertés individuelles ! Et dans ce cas précis, on exige que l'état paye pour laisser à chacun ce choix ! Alors par pitié, soyons cohérents, laissons le choix (gratuit pour l'état) du travail le dimanche libre à chacun, au nom de ces mêmes libertés !Enfin, je ne vois pas en quoi l'augmentation du temps de travail, fut-il uniquement (pour l'instant) pour les cadres, est moins un sujet de société. Qu'on propose d'augmenter les heures sup (en les défiscalisant) et l'opposition monte au créneau. Et quand on parle de supprimer le samedi chomé et les RTT, silence, ca ne concerne que des gens silencieux. hypocrisie...(quant-aux clivages ... effectivement, si d'autres personnes se sentaient concernées, il n'y en aurait pas : tout le monde serait contre ...)
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C
Dis plutôt que c'est en tant que catholique que tu t'opposes au travail dominical, et je respecterai tes arguments. Car ceux que tu tiens là sont trop paternalistes, moralisateurs et condescendants pour que je les accepte. D'ailleurs, tu ne sais rien de l'effet que cela aura sur la société.
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L
Ce n'est pas parce que ce n'est pas la cause unique d'un délitement qu'il faut l'ignorer.
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