Vie privée des politiques : la grande hypocrisie
Et voilà! Closer a été condamné aujourd'hui à 15 000€ d'amende pour avoir osé diffuser des photos de François Hollande en compagnie de sa compagne! Et en quel honneur? Au nom du préjudice moral subi par Valérie Trierweiler, l'heureuse élue.
Et quel préjudice? A première vue, ce jugement semble sanctionner le magazine, mais en réalité, celui-ci a gagné puisque le retrait de Closer des kiosques, réclamé à toutes forces par Hollande, n'a pas été demandé par le tribunal de Nanterre. Encore heureux! Mais 15 000€, c'est déjà trop. Pourquoi devrait-on taire une relation montrant toute l'ambiguïté des rapports entre la presse et les politiques? Pourquoi devrait-on cacher que celle qui suivait pour Paris-Match l'actualité du PS depuis 2004, va au cinéma le soir avec son chef, avant de lui baiser le front? Pourquoi toucherait-elle 15 000€ pour cette "dénonciation" qui aurait dû être publiée depuis bien longtemps? N'est-ce pas ce genre de condamnation qui incite les journaux, au sens large du terme, à se taire?
Closer n'ayant pas été retiré des kiosques, faut-il en déduire que désormais, on a le droit de tout montrer? Ce serait une belle erreur. Mais en l'occurrence, quel scoop Closer a-t-il dévoilé? La liaison de Hollande avec la journaliste politique (non non, les journalistes restent indépendants, on vous dit!), était connue depuis quelques mois. "Nous ne faisons que publier des photos relatant une histoire qui s'écrit dans divers magazines, de nombreux livres et sur des sites internet depuis des mois", explique la rédactrice en chef du mag people, Laurence Pieau, qui a beau jeu de parler d' "hypocrisie". De nombreux blogs ont effet lâché l'information ces derniers mois...
François Hollande, lui, donnait hier sur RTL sa petite définition de la séparation entre les sphère spubliques et privée : "On doit exiger de la transparence de la part des personnages publics mais on n'a pas à s'ingérer, à s'immiscer dans leur vie personnelle et je crois que c'est très important, pas pour moi, mais pour l'ensemble de vie politique de faire cette séparation". Flamby, quand tu nous tiens... tu nous fait bien rire.
On croit tomber sur la tête! Qui s'est pavané pendant tout ce temps aux côtés de sa soi-disant compagne, alors qu'en fait, chaque soir, il allait en rejoindre une autre? Il ne faut pas confondre respect de la vie privée et schyzophrénie, tout de même. Le cas Hollande rejoint exactement celui de Sarkozy, qui tout en maintenant une liaison avec la journaliste du Figaro Anne Fulda, continuait de se présenter aux yeux des Français ébahis comme chef d'une famille constituée de sa propre personne, de Cécilia et de leurs enfants.
On ne doit pas tout savoir, bien sûr. Si Dominique Perben sort avec sa femme de ménage, cela ne me regarde pas. De la même façon que les vacances de Martine Aubry ne nous concernent en rien. Mais si Marie Drucker est en relation particulière avec un ministre, cela nous importe. Et si Sarkozy drague les paparazzis, il ne peut pas se plaindre s'ils le suivent jusque sur son lieu de vacances.
Et lorsque Hollande s'affiche avec une compagne qui n'est pas la sienne (Ségolène Royal) et s'en sert politiquement, alors je crois profondément que c'est non seulement un droit, mais aussi un devoir de la part des médias de nous en alerter. D'autant plus si la compagne réelle est chargée de suivre pour un hebdo l'actualité du parti socialiste! Car de quoi se plaint Hollande? Qu'on montre sa vie privée, c'est-à-dire des photos de vacances, ou qu'on dévoile à la France entière le nom de sa compagne?
Le phénomène d'intérêt des magazines people pour les politiques est "relativement" nouveau. Mais s'il prospère, à qui la faute? Ségolène Royal invite les médias à la filmer à la maternité avec son nouveau-né! Sarkozy invite les médias à couvrir le moindre de ses footings! Comment comprendre que les mêmes exigent qu'on respecte leur vie privée? La frontière a bougé, et ils en sont largement responsables... Alors cessons l'hypocrisie.